« Fake News » : mon plaidoyer pour toutes les victimes, de l’épouse du Ministre Mame Mbaye Niang à toutes les personnes anonymes

L’instrumentalisation d’une culture de la calomnie est en train de perdre certains Sénégalais en cette veille d’élection présidentielle. La parole méchante, destructrice est mobilisée pour nuire, pour faire perdre la face à l’autre, cet autre que l’on combat, celui-là même que nous détestons, très souvent par simple transfert, sur lui, du désamour de notre propre être.
Salir l’image d’une personne par ignorance de la vérité est une chose que l’on peut à limite tolérer, quoique chaque personne doive se donner la peine de quelques vérifications avant d’étaler sur le marché public des informations sans fondement. Cependant, savoir que nous nous faisons le relais d’un mensonge outrancier inventé par d’autres est d’une bassesse à laquelle aucun être ne devrait s’adonner, ne serait-ce que par estime envers sa propre personne. L’addiction à la calomnie décrédibilisant l’adversaire est une pathologie qui ne détruit pas uniquement la victime, mais le calomniateur lui-même. Car, à force d’être insensible à son propre mensonge au point de le considérer comme vrai, l’auteur de récits imaginaires développe un handicape psychologique, une sorte de folie du verbe incontrôlé et incontrôlable, appelée aussi mythomanie, c’est-à-dire cette morbidité langagière que les grandes âmes exècrent au plus haut point.
Dans un État où la législation condamne de tels faits, même si l’acte relève de la pathologie, l’affabulateur encourt des peines à la mesure du préjudice qu’il commet. Le relayeur d’affabulations n’est non plus pas épargné, même s’il se réfugie derrière un « je ne savais pas que… ». Pourquoi alors soutenir, véhiculer des informations fausses, avec une telle volonté de convaincre le public, si vous ignorez qu’elles sont des inepties inouïes et outrageantes ?
Je rappelle que j’ai été outré, depuis quelques temps, par des « fake news » fomentés à l’encontre de personnes que je connais plus ou moins bien. Ces mensonges préfabriqués et illustrés par des « signes logographiques », photographiques, vidéographiques (screencast) ou sonores, poussent facilement tout individu imprudent à les tenir pour vrais, puisque tous les « artifices érotiques » de l’imaginaire sont réunis pour obstruer notre capacité de discernement. Tant qu’il s’agit d’« ennemis » ou d’adversaires accusés à tort, la tentation de croire en la véracité des accusations, voire l’intime vœu qu’elles soient vraies reste grande. Combien sont ces gens qui acceptent de tout gober tant qu’une calomnie est orientée vers cet « ennemi-ci » ou cet « ennemi-là » ? J’ai moi-même, à plusieurs reprises d’ailleurs, au cours de ma jeunesse, failli tomber dans de tels travers, parce que ne voyant que du « mauvais » chez celui ou celle que j’ai réduit à cette seule expression, comme s’il n’y avait jamais des « fleurs » dans le « mal ».
Mais heureusement que, et c’est ma différence d’avec les « imbéciles », je prends le temps de vérifier les informations avec les lumières critiques de mon esprit, cet esprit longtemps entrainé à l’incrédulité modérée. Cette posture m’a permis de me rendre compte jusqu’où la haine de l’autre pouvait mener certains êtres humains dans leur volonté de nuire.
Pour illustrer mes propos avec un « fake news « récent, je rappellerai comme annoncé dans le titre de cet article, une vidéo montrant une dame exhibant des liasses de billets de banque, présentée par un « con-menteur-tateur » comme étant l’épouse du ministre Mame Mbaye Niang, sur laquelle je suis tombé ce jour de vendredi 25 janvier 2019. Comme une trainée de poudre, une certaine presse en ligne et les réseaux sociaux se sont automatiquement et allègrement faits les échos, les relayeurs passifs de cette manipulation ourdie par des personnes malintentionnées. Ces énergumènes, tapis dans le confort de la désinformation, entretiennent un mimétisme accusateur, heureusement non contagieux — sinon on en viendrait à craindre ses effets néfastes sur l’ensemble de nos citoyens —, pour détruire la vie de personnes honnêtes. Si j’étais à leur place, aurais-je peut-être gagné à diffuser des contre-vérités pour espérer faire perdre des plumes aux personnes que je trouvasse gredines ? Mais, en toute sincérité, je me serais au moins convaincu, dans les abysses de mon idiosyncrasie, que je perdrai en crédibilité après l’avoir fait, dès que l’on découvrirait la supercherie malveillante. Comment pouvons-nous tomber si bas en tant que croyants ?
Nos mosquées et églises, encore heureusement d’ailleurs, sont remplies de fidèles, car le Sénégal, en dehors de sa laïcité constitutionnelle, est un pays de croyants multiconfessionnels. Toutefois, c’est au mépris parfois inconscient de nos propres valeurs religieuses, que nous rudoyons, en toute fierté, et sans le moindre regret, d’honnêtes et innocentes gens, pour flatter nos égos et pour nous nourrir de la haine contenue dans nos cœurs, qui, normalement, à travers l’expression manifeste de notre foi, devraient être vidés de leur substance nocive.
Attaquer, blesser, par le mensonge, l’être dans sa chair, au-delà d’être un péché abominable pour les croyants que nous sommes, me parait relever de l’insouciance de l’autre, insouciance vis-à-vis de ce qui peut l’affecter, c’est-à-dire à l’égard de toute chose capable de fonder l’idéal de vie commune dont l’homme de foi doit se faire l’apôtre.

Dr Malick GAYE AIDARA

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