Ismaila Madior Fall, ministre de la Justice, vient de lâcher une bombe. Interviewé par Jeune Afrique, le Garde des Sceaux a rejeté l’argumentaire selon lequel il y a un ciblage dans la traque des biens supposés mal acquis. A l’en croire, il y a des responsables de la mouvance présidentielle qui, également, subissent les affres de la justice. « Des membres du parti au pouvoir ont aussi été condamnés, et d’autres épinglés par la Cour des comptes – ils remboursent aujourd’hui les sommes en cause. Personne ne parle d’eux car ils ne sont pas candidats à la présidentielle », a expliqué le ministre de la Justice qui a refusé de dévoiler leur nom parce qu’il juge inutile de les « vilipender ».
Poursuivant, le ministre a laissé entendre que les critiques dirigées contre la justice sont subjectives. « Au Sénégal, on ne critique la justice que lorsqu’elle vise des candidats à la présidentielle. Il n’y a pas eu beaucoup d’affaires concernant des opposants, mais c’est de celles-là dont on parle le plus. Il y a malheureusement beaucoup de cas de détentions abusives dans les prisons sénégalaises. Certains détenus attendent parfois quatre ou cinq ans avant d’être jugés. Or, personne ne parle d’eux », a constaté le Garde des Sceaux.
S’agissant du procès de l’ancien maire de la ville de Dakar, Khalifa Sall, condamné à 5 ans de prison ferme, pour détournement de deniers publics, le ministre de la Justice estime qu’il n’y a pas eu de précipitation. Selon lui, le procès s’est déroulé dans les délais impartis par la loi. « L’affaire Khalifa Sall a duré presque deux ans, les autorités judiciaires l’ont donc jugée dans un délai raisonnable. À chaque fois qu’il a été question d’un délibéré, les juges ont pris un mois, alors que dans certains dossiers ce délai n’excède pas une semaine, voire deux jours. Dire que le processus judiciaire aurait été volontairement accéléré ne tient pas la route », précise-t-il.