Habib Sy a annoncé sa candidature pour la présidentielle de 2019. Il se positionne sous la bannière de sa formation politique, nouvellement créée, le Parti de l’espoir et de la modernité (Pem)/Yaakaaru Reew mi, mais vise en même temps la casquette de « candidat des Wadistes ». Entretien.
Habib Sy, vous avez annoncé votre candidature pour la présidentielle de 2019. Qu’est-ce qui vous motive ?
Je déclare ma candidature compte tenu de mon expérience dans l’État- j’ai fait 10 ans de gouvernement- et compte tenu aussi de mon expérience dans l’administration- j’ai fait 33 ans d’administration.
Est-ce suffisant pour solliciter les suffrages des Sénégalais ? Y a-t-il d’autres raisons ?
Je suis affecté par certaines situations dans mon pays. Particulièrement, je suis profondément affecté par l’affaissement de la démocratie. Je suis depuis 1974- pour avoir accompagné Me Abdoulaye Wade- tous les combats pour l’instauration d’une société démocratique au Sénégal. Je suis affecté par la manipulation de la constitution de notre pays et des autres institutions par le pouvoir exécutif. Je suis profondément touché par la situation des jeunes qui, confrontés à la difficulté de trouver un emploi, empruntent le chemin des déserts pour y mourir ou celui de l’océan pour aller sombrer. Je suis affecté par la déliquescence du système de notre enseignement de façon générale. Affecté, je le suis par la situation du monde paysan parce que, je suis fils de paysan. Comment pouvez-vous comprendre que la FAO (Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture, Ndlr) déclare que dans cette partie de la zone nord du pays, au cœur du fleuve Sénégal, et où il y a des terres aménagées, 750 000 Sénégalais puissent être menacés par la faim et la famine ? Ce simple fait, révélé par des institutions internationales, témoigne de l’échec des politiques générales du gouvernement de Macky Sall. La santé, c’est la même chose. Et pour toutes ces difficultés, tous ces problèmes, compte tenu de notre expérience dont je viens de vous parler, nous estimons détenir des solutions.
Lesquelles ?
Bon, je ne pourrais pas développer tout le programme. Je veux insérer au Sénégal une société libérale, sociale et solidaire. Cela veut dire une société libérale, en plus du respect des libertés individuelles, des libertés publiques, etc., il y aura la liberté d’entreprendre. Dans ce cadre, l’Etat va mettre en œuvre toutes les conditions politiques, économiques, sociales possibles pour permettre aux Sénégalaises et aux Sénégalais de s’enrichir. Mais, ceux qui s’enrichiront le plus vont donner un effort de solidarité. J’expliquerai tout cela plus largement. Mais pour le moment, retenez une société libérale, sociale et solidaire, à travers un projet de société et un programme que je présenterai aux Sénégalais. Parce que, le programme est large, il touche tous les secteurs. Donc, je ne pourrais pas le développer comme ça.
Et vous pensez être en mesure de faire la différence avec ce programme-là ?
Je vous ai dit que j’ai fait 33 ans d’administration. Je connais le Sénégal des profondeurs. J’ai fait 10 ans de gouvernement. Je connais tout le pays, tous les coins et recoins. J’ai accompagné Abdoulaye Wade quand je faisais la classe de 1ère en 1974 jusqu’à notre accession au pouvoir et jusqu’à la perte du pouvoir en 2012. Vous imaginez donc que je connais le Sénégal. Pour cela, je ne peux avoir que de l’espoir. Encore que mon parti s’appelle Parti de l’Espoir et de la Modernité.
Vous clamez souvent votre proximité avec Wade. Lui avez-vous parlé de votre candidature ?
Je n’ai pas consulté Me Abdoulaye Wade. Mais, je souhaite être le candidat des Wadistes. Parce que, Wade est mon maitre, je ne le nie pas.
Le Pds a déjà un candidat : Karim Wade…
Je veux préciser que je ne suis pas tout simplement le candidat des Wadistes. J’ai mon parti. J’ai fait cette déclaration au nom de mon parti. Maintenant, il est évident que je vais trouver des alliances pour aller à l’élection présidentielle.
Avec Idrissa Seck, par exemple ?
Je ne sais pas… Enfin, oui. C’est-à-dire que quand il y aura un pôle de candidats, il est évident que tous les candidats déclarés vont se retrouver. Non pas pour soutenir un ou deux candidats mais pour au moins, définir une plateforme commune par laquelle nous allons aller ensemble à l’élection présidentielle.
Nous avons combattu le parrainage dans le cadre du Front pour la résistance démocratique. Nous allons continuer à le combattre. C’est une loi anti-démocratique. C’est une loi de régression pour le système électoral de notre pays. Comment voulez-vous mettre sur un pied d’égalité des candidats de partis politiques avec des candidats indépendants ? Le but recherché par Macky Sall, c’est de supprimer les partis politiques au Sénégal. Parce que si tout candidat doit être parrainé, vous n’avez plus besoin d’avoir un parti politique pour aller aux élections. Vous pouvez rester dans votre petit coin jusqu’à la veille des élections et proclamer votre candidature. Il s’y ajoute que le parrainage tel qu’il est défini, va même semer la confusion.
On va assister à deux voire trois élections d’ici à 2019. Le fait d’aller chercher des parrains, c’est une campagne électorale. C’est de l’argent. C’est des moyens. Après vous aller faire la campagne électorale, c’est de l’agent. C’est des moyens. Après il faut couvrir l’élection présidentielle. C’est des moyens. C’est de l’argent. Ce qui veut dire que c’est une piste stratégique pour Macky Sall d’appauvrir déjà les candidats de l’opposition. Or, la mission et le rôle des partis politiques sont définis dans la Constitution.
C’est dommage, mais le ministre de la Justice qui se dit constitutionnaliste, qui est le conseiller du président Macky Sall en matière de constitution, passe son temps, contrairement à ce qu’il dit, à consolider les manipulations constitutionnelles de façon anti-démocratique, et à déconsolider les acquis démocratiques. C’est ça son rôle. Et nous continuerons à les combattre, à combattre ses lois, dans le cadre du Front pour la résistance démocratique, en obligeant le président Macky Sall de ne pas la mettre en œuvre.
Nous n’en sommes pas pour le moment à la question de savoir si on aura le nombre ou pas. Ce n’est pas ça le problème.
Auteur: Cheikhou AÏDARA – Seneweb