HORIZON avec… Souleymane Sèye Ndiaye alias Julo, acteur sénégalais : «La Pirogue m’a ouvert beaucoup de portes»

HORIZON AVEC… Souleymane Sèye Ndiaye alias Julo, acteur sénégalais

«La Pirogue m’a ouvert beaucoup de portes»

Souleymane Sèye Ndiaye, est plus connu sous le pseudonyme de Julo au Sénégal. Parti de la mécanique au théâtre, du théâtre au mannequinat et du mannequinat au cinéma, il est aujourd’hui l’une des valeurs montantes du 7e art africain. Acteur dans le film Les Etoiles de Diana Gaye, ce comédien de talent que nous avons croisé il y a un an, au festival de film africain de Khou­ribga évoque sa carrière, ses ambitions dans un entretien à bâtons rompus.

Depuis que le film Les Étoiles est en salle et dans les festivals on remarque que c’est vous qui représentez souvent la réalisatrice. Pourquoi vous et pas les autres ? (Sourire) C’est vrai qu’au dernier Fespaco j’étais allé porter le film. Mais la réalisatrice était là aussi et les autres membres de l’équipe. Ici à Khouribga, je suis venu avec une autre actrice qui a joué aussi dans Les Etoiles. Au fait, c’est nous qui sommes devant la scène. Certes il y a les cinéastes qui se connaissent entre eux mais si un acteur porte un film, pour moi c’est très normal qu’il représente son film car il est l’acteur que l’on voit à l’écran. C’est à travers son image qu’on retient le film. Participer à ces genres de rencontre après avoir joué dans un film permet aussi aux acteurs que nous sommes, de faire des rencontres professionnelles qui peuvent nous permettre d’être sélectionnés pour d’autres projets dans le monde du cinéma. Je remercie au passage Diana Gaye qui nous met en avant ainsi que la direction de la cinématographie et le ministère de la culture qui nous appuient… . Depuis que vous avez joué dans La Pirogue de Moussa Touré, votre carrière a pris une autre tournure. Vous semblez maintenant très recherché par les réalisateurs du cinéma. Oui, évidemment. Je remercie Moussa Touré qui est un père pour moi et m’a beaucoup aidé. C’est grâce à lui que j’ai eu un agent à Paris. Depuis La Pirogue, il y a eu Les Etoiles, Introcursus et Les Tirailleurs sénégalais, La Permission qui est un téléfilm avec France 3. Tous les films que j’ai eu à faire, j’y joue un bon rôle en tant qu’acteur principal. J’ai été repéré grâce à ma partition dans La Pirogue, ce qui m’a ouvert beaucoup de portes. Depuis, je ne m’intéresse qu’à ce qui touche au cinéma. Vous dites que vous ne jouez que des rôles principaux. Quel est votre atout principal ? J’ai fait un casting en 2014, et là-bas on m’a demandé de ne pas jouer car j’ai tout ce qu’il me faut : le physique et la gueule. Donc, ils m’ont dit d’exploiter ce talent inné en moi. Chez moi, c’est un don car je me disais souvent que le Sénégalais est né acteur. Il suffit d’avoir une bonne direction et de bien comprendre le personnage des projets et après ça passe. Comédien et acteur, quand vous venez à ces genres de festival, quelles sont vos objectifs ? Mes objectifs, c’est de regarder beaucoup de films pour apprendre de nouvelles choses. Je profite aussi des débats ou chacun se fait une opinion personnelle de tous les films. J’ai une autre lecture par rapport aux débats, on rencontre le maximum de réalisateurs et d’acteurs. On peut faire la connaissance d’un acteur et dans l’avenir tomber sur un même projet. Ces débats me permettent de faire connaissance avec des gens avec qui je serai à l’aise demain lors d’un tournage. C’est pour cela que les réalisateurs mettent les acteurs côte à côte pour qu’ils puissent se familiariser et être à l’aise entre eux. Depuis que je suis devenu comédien, j’ai compris que le cinéma est complexe. Avant, je regardais le film par rapport à l’histoire ou les films d’action, mais maintenant ce n’est plus le cas, je regarde toutes sortes de films avec un regard professionnel. Je fais plus attention à l’image, le son, les plans et plein de choses dont les thèmes. Au fait tout est important même la façon dont commence ou termine un film. Au Fespaco ou à Khouribga, est-ce-que des réalisateurs vous ont déjà approché ? Oui. Au Fespaco j’avais rencontré un réalisateur qui avait remporté le prix du meilleur court-métrage et qui est d’origine burkinabé et vit en France. Après le Fespaco, il m’a appelé à Paris pour un casting prometteur. Je suis toujours à l’écoute des résultats. C’est un projet qui m’intéresse beaucoup. J’ai eu aussi à rencontrer d’autres réalisateurs avec qui j’écris souvent et d’autres qui sont des membres d’organisation de festival. Il y en a même certains qui m’ont invité à leur festival grâce à ma prestation dans La Pirogue. Aujourd’hui est ce que vous êtes en tournage pour un film ? Actuellement non. On est à la rentrée. Au cinéma, les premières dates qu’on nous donne pour les tournages ne sont pas toujours fixes. Les réalisateurs sont confrontés à des problèmes de retard ou des problèmes techniques… Pour le moment je suis à l’écoute pour une autre production. Mais je dois participer sur un film de Moussa Touré qui est actuellement en tournage à Dakar. Donc j’ai pas mal de projet qui sont en attente. Si je dis Latyr Sunu Khaly ça vous dit quoi ? (Il crie très ému) Oh là ! là ! là ! Latyr Sunu Khaly ! Machalah ! Je présente une fois encore mes condoléances à sa famille. C’est quelqu’un que j’ai connu à travers un ami qui s’appelle Amidou Ly alias Maestro. Latyr, après notre connaissance, c’est lui qui faisait toutes mes chemises, il me les offrait et j’étais tout le temps chez lui pour discuter. C’était un homme pieux, ambitieux et qui croyait beaucoup à son travail. C’est grâce à lui que j’ai fait mes premières apparitions sur le magazine Thiof. Donc, la nouvelle de son départ vers d’autres cieux m’a beaucoup surpris et attristé. J’étais parti demander de ses nouvelles à Fara Oudé et c’est lui qui m’a appris le décès de Latyr. Cela m’a beaucoup touché. La nouvelle de son décès m’avait rendu des nuits dures. Outre les réalisateurs sénégalais vous avez joué avec un Danois ? Bien sûr ! J’ai joué pour un Danois qui vit à New York, Jasper Jess pour la Biennale de Venise, un film d’artiste et Philippe Niang qui est un Franco-Sénégalais qui travaille beaucoup avec la télé à Paris et aussi avec Diana Gaye qui est une sœur pour moi. Au fait, avec tous les réalisateurs avec qui j’ai eu à travailler, on devient après des amis car on maintient des relations qui vont au-delà de nos relations professionnelles. Je travaille aussi avec Fabacary Coly, Maison De Justice. J’ai aussi bossé avec une Franco-Américaine, Dio Issa Diop avec qui, j’avais fait mon premier court-métrage. On voit souvent en vous le sosie du défunt comédien Oumar Seck qui est un grand acteur. Cela vous fait quoi d’être comparé à ce comédien ? On me compare souvent à des gens que je ne connais pas. Je ne sais pas en réalité qui ils sont. Donc cela me permet à chaque fois de faire des recherches sur eux, pour voir leur travail et comprendre pourquoi les gens me comparent à eux. Qui est votre modèle d’acteur ? Mon modèle d’acteur c’est Denzel Washington car j’aime bien les Américains. Denzel c’est quelqu’un qui a un jeu d’action vivant. Je regarde ses œuvres pour me perfectionner. Par ailleurs, j’aime bien Ibrahima Mbaye qui est aussi un bon acteur qui fait partie des meilleurs au Sénégal. Je me suis dit que là où j’en suis avec le cinéma africain et européen, c’est vraiment une chance que j’essaye de saisir. Car il y a le Sénégal qui est derrière moi, et je veux rendre fier mon pays. C’est un combat personnel. Vous êtes parti de la mécanique au théâtre, du théâtre au mannequinat et du mannequinat au cinéma. Alors quels sont les bons souvenirs que vous gardez de ces activités ? (Rire). Ce sont des choses qui sont toutes très importantes. J’ai de beaux souvenirs au Lycée Blaise Diagne et Delafosse avec mes amis avec qui je m’entendais bien et certains professeurs pensaient même que nous étions de la même famille, alors que ce n’était pas le cas. On ne faisait que des conneries, surtout moi qui suis un peu rigolo. Pour le mannequinat, je l’ai fait pour pouvoir après, faire du cinéma car j’en rêvais depuis tout petit et mon père m’appelait même «mon acteur». Comme j’aimais les films d’action, j’ai aussi fait du Karaté, Aikido full contact et du Kung Fu, tout cela pour arriver à faire du cinéma. J’ai fait des recherches et j’ai vu des acteurs qui faisaient du mannequinat, de la publicité et je me suis dit que j’ai trouvé une porte d’entrée pour réaliser mon rêve. Et c’est comme cela que je suis devenu acteur avec Moussa Touré qui m’a repéré lors d’un défilé à la télévision. Par la suite, il a cherché à me contacter pour un casting et il m’a demandé de tout laisser pour me consacrer sur son projet qui a certes, eu des retards, mais on a eu les résultats escomptés. Et c’est ce film, La Pirogue qui m’a projeté dans le milieu. Vous interprétez vos rôles dans combien de langues ? J’interprète dans quatre langues (wolof, français, anglais et italien). Je ne suis pas parfait en italien mais j’arrive à parler l’italien car j’ai fait l’Italie. Pour l’anglais je faisais partie du club d’anglais du Lycée Blaise Diagne car j’aime bien l’anglais. J’ai fait des études en mécanique mais pour des raisons familiales avec le décès de mon père, je devais épauler mon frère qui était le seul à travailler et j’ai dû tout abandonner. J’ai fait donc des études professionnelles pour soutenir la famille. Je suis par la suite parti en Italie avec ma femme qui était partie pour accoucher, une femme brave et très jalouse (rire). Je voulais en même temps découvrir le pays de la mode (sic). Mais la réalité en est autre, même s’il y avait des agences, il y a de l’escroquerie. Cependant, je me suis résigné à faire du cinéma. Je l’ai commencé au Sénégal et je me suis dit qu’il fallait que je retourne dans mon pays pour terminer ce que j’avais commencé et j’y suis resté. Je voulais ouvrir une agence et tout, mais tout se fait petit à petit et c’est par la suite que le film a été choisi au festival de Cannes. J’ai ensuite rencontré mon agent, il y a eu des projets dont celui de Diana, des castings et c’est comme ça que j’ai duré en France. A chaque fois que je termine un projet je retourne au pays. En effet, je veux progresser dans ma carrière. Toutefois, je n’ai pas envie que mon pays m’oublie, je porte le drapeau du Sénégal à travers le monde et je lutte pour qu’on reconnaisse ce drapeau-là du cinéma, grâce à ma personne.

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