Le Fonds d’appui à l’investissement des Sénégalais de l’extérieur (FAISE) créé par l’ancien Président Abdouaye Wade n’avait d’autre but que de distribuer de l’argent à fonds perdus aux Sénégalais de la Diaspora considérés comme un vivier électoral. Ce fonds, dont la dotation est passé de 340 millions CFA à deux milliards aujourd’hui, est anormal, illégal et inefficace.
Il est anormal car les impôts des Sénégalais ne doivent pas servir à financer les économies des pays où se trouvent les Sénégalais dans le monde. Nos pauvres deniers doivent servir à doper notre pauvre économie à nous et à faire face à toutes nos priorités. C’est le contraire qui devrait se passer : les immigrés doivent puiser là où ils sont et venir investir chez eux. Ce fonds consacre l’échec de l’immigration à la sénégalaise.
Le FAISE est illégal. L’octroi de crédit est une activité bancaire et financière qui ne doit se faire qu’avec une licence dûment octroyée par la Banque centrale. Prêter de l’argent à des particuliers et en retirer un bénéfice (6% dans le cas du FAISE) est strictement régulé et contrôlé dans toute l’UEMOA. Le FAISE n’a jamais reçu un agrément pour ce faire. Son activité est illégale, par conséquent. Le décret n° 2008-635 du 11 juin 2008 qui l’a créé dit que son administrateur doit être un fonctionnaire de la hiérarchie A, disposition allègrement foulée au pied par le président de la République qui y a positionné une cliente politique comme administratrice, membre de son parti.
Le FAISE est inefficace car n’étant pas outillé pour optimiser la chose la plus essentielle dans le business de l’octroi de crédit : le recouvrement. Le Fonds ne communique jamais sur son taux de recouvrement car, comme dans le cas de tous les fonds politiciens, l’argent gracieusement distribué est perdu à tout jamais. Il n’y a aucun moyen de coercition et le FAISE n’a pas les moyens de parcourir toute la Diaspora pour réclamer son dû. Les projets sont griffonnés par les bénéficiaires juste pour recevoir leurs parts qui servent à tout sauf l’efficacité économique. Le FAISE communique sur l’argent distribué mais jamais sur des réussites de bénéficiaires. Il n’y en a pas et il n’y en aura pas. Les principes, les mécanismes et les finalités du FAISE n’ont pas une orientation de garantie de l’efficacité. Et, sans garantie de l’efficacité (le retour sur investissement dans ce cas précis), l’argent dépensé est perdu à tout jamais. Le FAISE n’est intéressé par aucun des ratios d’efficacité financière : endettement, rentabilité, structure des coûts, productivité, cash flow, solvabilité, liquidité, délai de récupération du capital, équilibre financier ou autres.
L’existence du FAISE renseigne sur notre rapport à l’argent, un rapport prédateur, prévaricateur, irrationnel et prélogique ; il s’y ajoute une solidarité de circonstance, ostentatoire et de consommation immédiate non productrice de valeur ajoutée d’investissement. Le Compte K2 dans les années 1970, le financement des Maîtrisards dans les années 1980, le FNPJ dans les année 2000 en sont des exemples achevés. Toutes nos banques et institutions financières ont fait faillite ou sont à genoux. L’enrichissement illicite et toutes les formes de délinquances financières sont un sport national, en-haut et en-bas de la société.
La suppression du FAISE, qui est un machin anormal, illégal et inefficace, devait être l’une des ruptures annoncées en 2012. Il n’en a rien été. La perpétuation du FAISE est un symbole évident de la survivance du « système WADE » qui jouait avec l’argent public.
Mamadou Sy Tounkara